L’accessibilité des festivals de films de montagne : une évolution notable, mais encore incomplète
Par Clara SERAGLINI, grâce au travail d’Arnaud Guillemot
En janvier 2025, le collectif Silence, on grimpe, fondé par Arnaud Guillemot, publiait un communiqué de presse pour dénoncer l’inaccessibilité des festivals de films de montagne et d’aventure pour le public sourd et malentendant. En France, 6 millions de personnes sont concernées, mais en 2024, seulement 13 % des projections étaient accessibles avec des sous-titres en français. L’accessibilité ne devrait pas être un simple ajout technique, mais un véritable levier d’inclusion culturelle et de démocratisation. Si une évolution est perceptible, ces efforts restent encore trop limités. Où en est réellement l’accessibilité des festivals de films de montagne ? Quels freins persistent et comment aller plus loin ?
Une évolution encourageante : des premières avancées significatives
En 2022, aucun festival de films de montagne et d’aventure ne proposait de sous-titrage en français pour ses projections, rendant ces événements totalement inaccessibles aux personnes sourdes et malentendantes. Mais en 2024, grâce à un travail de sensibilisation mené par divers collectifs et associations, la situation a commencé à changer :
- 12 festivals sur 40 ont introduit du sous-titrage au moins partiellement dans leur programmation.
- Une prise de conscience croissante a poussé certains organisateurs à repenser leurs pratiques.
- En plus de proposer l’intégralité de sa programmation de films avec des sous-titres en français, le Festival Femmes en Montagne a franchi une étape supplémentaire en intégrant des interprètes en Langue des Signes Française (LSF) pour l’ensemble des échanges sur scène, offrant ainsi une expérience plus inclusive. Il est devenu alors le premier festival de films de montagne 100% accessible au public sourd et malentendant.
Des lacunes persistantes qui limitent l’accès aux festivals
1. Une offre encore trop restreinte
Malgré les progrès réalisés, 70 % des festivals restent inaccessibles aux spectateur·rice·s sourd·e·s et malentendant·e·s. L’offre reste donc extrêmement limitée et géographiquement inégale : la majorité des événements accessibles sont concentrés en région Rhône-Alpes, laissant de nombreux publics sans solution dans d’autres territoires.
2. Un manque de visibilité des films accessibles
L’accessibilité passe aussi par l’information claire et visible du public. Or, trois festivals sur quatre ne mentionnent pas de manière explicite les films sous-titrés sur leurs supports de communication (sites internet, affiches, réseaux sociaux). L’absence de logo VFST (Version Française Sous-Titrée) ou de signalétique adéquate dissuade les spectateur·rice·s concerné·e·s de se déplacer.
3. Une accessibilité partielle des échanges et des débats
Si le sous-titrage des films progresse, les échanges entre les intervenant·e·s et le public restent inaccessibles. À ce jour, aucun festival n’a mis en place de sous-titrage en direct des discussions. La seule alternative a été l’interprétation en Langue des Signes Française (LSF) au Festival Femmes en Montagne, une initiative qui mérite d’être généralisée.
Un tournant à confirmer pour les années à venir
Face à ces constats, une dynamique semble s’amorcer. À l’automne 2024, une lettre ouverte, écrite par Arnaud Guillemot, adressée aux festivals a suscité une réaction : une dizaine d’événements ont annoncé vouloir intégrer le sous-titrage intégral de leur programmation et améliorer leur communication autour de l’accessibilité dès 2025. Une avancée à suivre de près.
Quelles pistes pour accélérer le mouvement ?
- Généraliser le sous-titrage : faire en sorte que chaque festival propose des films accessibles en VFST et VOSTFR.
- Améliorer la communication : intégrer systématiquement un pictogramme d’accessibilité sur tous les supports de diffusion.
- Développer l’interprétation LSF et la transcription en direct pour que les échanges ne restent pas une zone d’exclusion.
- Encourager un soutien institutionnel et financier pour accompagner les festivals dans cette transition.
Conclusion : une dynamique positive, mais un engagement à renforcer
L’accessibilité des festivals de films de montagne et d’aventure a connu une avancée notable en deux ans, mais reste encore trop partielle et inégalement répartie. Si certaines initiatives montrent la voie, elles doivent être consolidées pour que l’inclusion ne soit plus un effort ponctuel, mais une norme incontournable. L’année 2025 sera-t-elle celle d’un véritable tournant ? La réponse dépendra des engagements concrets pris par les festivals, mais aussi du soutien du public et des acteur·rice·s du secteur.
En effet à ce jour, les festivals ne peuvent relever seuls ce défi : Femmes en Montagne a réussi le pari grâce à une équipe bénévole très investie, entourée de professionnelles soutenues par certains mécènes. En plus d’un investissement personnel, l’accessibilité ne deviendra une norme que grâce à l’obtention de subventions et mécénats pérennes (👉 devenir partenaire). L’aventure a démarré mais la route est encore longue…