08 Août 2025

Filmer son premier documentaire en montagne et en autodidacte – Rencontre avec Amélie Mauro, réalisatrice du film Le Piolet de Verre

À l’occasion de la projection du documentaire Le Piolet de Verre lors de la 5ᵉ édition du festival de films…

À l’occasion de la projection du documentaire Le Piolet de Verre lors de la 5ᵉ édition du festival de films Femme en Montagne, sa réalisatrice Amélie Mauro nous raconte comment sa rencontre avec Fabienne Sicot-Personnic lui a permis de proposer cette parenthèse de “résilience sur le toit du monde. Le Piolet de Verre a remporté le prix du public 2024 lors du Festival. 

Cet échange avec Amélie nous permet de passer derrière sa caméra afin de comprendre son évolution de courtes vidéos partagées avec sa communauté YouTube, à la réalisation de son premier documentaire de 52 minutes retraçant l’expédition de l’alpiniste Fabienne, où elle gère tous les aspects complexes d’une réalisation : de la production au mixage du son jusqu’au financement – le tout parfois à distance, ou sur des sentiers escarpés !

Par Clémentine Rousset

Un documentaire brisant les plafonds de verre

Le Piolet de Verre met en lumière deux aspects sous-représentés : la place des femmes dans l’alpinisme, ainsi que la place du handicap en montagne. À travers son ascension, Fabienne Sicot-Personnic prouve aux spectateur·ices qu’une femme alpiniste a toute sa place au sommet de l’Everest, en se plaçant comme la 14ᵉ femme française ayant été au bout de ces 8,849 mètres. C’est pourtant la première femme porteuse d’un double handicap qui réussit cet exploit. 

Le Piolet de Verre est une référence à la maladie de Lobstein, la maladie des os de verre qui a été diagnostiquée à Fabienne. S’ajoute à cette dernière la découverte d’une spondylarthrite ankylosante, une maladie découverte après la naissance de ses enfants qui entraîne une forte perte d’autonomie et une inflammation des articulations.  

Le documentaire d’Amélie est avant tout un message d’espoir, un modèle de résilience pour celles et ceux qui auraient envie d’entreprendre et de croire en leurs rêves malgré la maladie. 

Un projet de documentaire né au hasard d’une rencontre

Amélie fait la rencontre de Fabienne par l’intermédiaire d’une connaissance, et décide de la suivre dans son projet. “J’étais dans un bar un jour, et je vois cette connaissance qui me dit “ah, mais toi, tu filmes ! Je connais une femme qui va faire un projet incroyable, rencontre-la !” j’ai dit OK, je l’ai appelée et on s’est rencontrées”. 

Malgré la cadence effrénée de Fabienne qui vaudra à Amélie “la pire crise d’asthme de sa vie”, la première rencontre des deux femmes marque le début d’une aventure commune d’un an et demi : capturer la préparation de Fabienne pour son ascension de l’Everest. 

Le défi de la réalisation d’un premier film, en montagne et à distance

Le Piolet de Verre est le premier film d’Amélie. La réalisatrice était néanmoins habituée à partager son expérience de la vie en camping-car sur sa chaîne YouTube et savait déjà comment filmer et organiser des vidéos. Elle rapporte : “l’aspect que j’ai découvert en plus c’est l’après : comment pitcher, vendre, comment trouver des financements, je n’en ai pas trouvé, c’est que je n’ai pas encore bien appris, mais ça va venir !”. Tout autre défi pour Le Piolet de Verre, puisqu’elle se forme de manière autodidacte, “sur le tas” comme elle le dit, et ce, dans des conditions challengeantes -en montagne-.

Filmer en montagne

Filmer en montagne, cela signifie suivre Fabienne avec tout le matériel nécessaire : un gros stabilisateur, la caméra, l’appareil photo, la gestion du drone… le tout sur un terrain technique “dans une côte raide avec une Fabienne qui trace et qui parle en même temps, je me suis mise direct dans le bain !”.

Alors comment gérer le travail de prises de vue dans un environnement jusqu’alors inconnu ? Amélie confie qu’une autre difficulté a été de capturer les bonnes images au bon moment, dans des conditions difficiles : “C’est plus Fabienne qui a dû refaire le même effort à chaque fois parce que je lui disais est-ce que tu peux revenir, car ça bouge […] donc c’est plutôt à l’alpiniste de refaire à chaque fois la même chose”. 

Faire filmer Fabienne

Le documentaire est né d’une collaboration entre les deux femmes. Sa spécificité est qu’Amélie n’a pas été présente lors de l’ascension de Fabienne : la deuxième partie du documentaire s’est déroulée entièrement à distance. Les images d’Amélie s’arrêtent à la fin de la préparation mentale et physique de Fabienne et elle lui délègue le précieux rôle de capturer les images avec sa GoPro et son téléphone – équipements qui gèleront à cause des températures extrêmes à -50 °C. La consigne donnée à Fabienne était simple, “filme le plus possible”. 

Le défi a donc été de faire filmer Fabienne, en plein effort. “Après tout, ce n’est pas son métier de filmer, et en plus, elle gravissait l’Everest. Il est donc normal qu’elle n’ait pas beaucoup pensé à filmer. Pourtant, je trouve qu’elle s’en est bien sortie. Elle s’est même filmée en train de se laver les cheveux, c’est des moments auxquels je suis contente qu’elle ait pensé. »

Avec les images récupérées, la réalisatrice s’est adaptée et a continué le montage pour suivre le fil du documentaire. Le résultat des deux points de vue offre aux spectateur·ices des images et des prises de vues spontanées, intimistes et au plus près de l’expérience en haute altitude de Fabienne.

Et après ce premier film ?

Amélie aime raconter des histoires, suivre l’avant et l’après aventure. Aujourd’hui, elle est toujours monteuse, mais la réalisation l’attire beaucoup, notamment celle de films de montagne. C’est ce premier projet qui lui donne envie “d’en refaire plein d’autres”. Elle se lance d’ailleurs dans la préparation d’un deuxième documentaire avec Fabienne, qui après avoir goûté à son premier 8000, est repartie au Népal pour gravir le Manaslu, un autre sommet tout aussi haut perché.

Amélie donne comme conseil à des femmes qui souhaiteraient entreprendre et réaliser des films de prendre un sujet qui leur tient à cœur, “je pense que c’est le plus important parce que tu peux faire que des belles choses avec ça !”.

Le Piolet de Verre est désormais disponible sur YouTube.

Cette interview est à retrouver également en vidéo sur Instagram.

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